Appendices Vialar

 

 

 

LE VILLAGE DE VIALAR

nom donné pour honorer la mémoire d’Augustin de Vialar

 

 

Période romaine

 

Vialar a été un dernier fort avancé occupé par une légion romaine qui protégeait tous les hauts plateaux, jusqu'à la plaine du Chéliff, de l’envahissement annuel des tribus nomades numides venant du Sud. Aussi, est-ce autant pour se protéger de leurs incursions que pour augmenter les superficies cultivables, notamment en blé, dont Rome avait un besoin grandissant, que l’empereur Septime Sévère décida dans les toutes premières années du IIe siècle de porter la ligne de défense (limes) au sud de l’Ouarsenis.

Elle était matérialisée par une route bien entretenue, jalonnée de « miliaires » (l’équivalent de nos bornes kilométriques) dont beaucoup ont été retrouvées.

La nouvelle voie stratégique venant de Teniet-el-Haad passait près de Vialar, puis à Columnata (Waldeck-Rousseau), siège du commandement du secteur. De là, par les environs de Trézel avec un avant-poste à Bénia, elle gagnait aux environs de Frenda, la ville de Cen, puis Martimprey et Tagremaret (Dominique-Luciani).

Dans la région de Vialar, on pouvait trouver des vestiges romains : sarcophages, chapiteaux, tables de sacrifices sculptées.

 

Période berbère

 

Exposé dans les dernières ondulations de l’Ouarsenis, le village de Vialar a existé dès le Xe siècle au temps des Berbères ; ce centre se nommait alors : Tissemsil (Coucher du soleil, étape) puis Aïn-Tissemsil.

 

Période Française

 

PROCÉDURE D’INSTALLATION DU VILLAGE :

 

19 avril 1887

Projet d’un centre à Tissemsil : 50 feux - 3.000 hectares.

 

12 mai 1887

Approbation par le Gouverneur Général.

Le village doit comprendre un périmètre de 3.000 ha environ. Pour cela, l’Etat devra acquérir :

- 1.137 ha 78 a 90 ca, appartenant à M et Mme Allemand.

- 1.028 ha 50 a, appartenant au caïd des Béni-Maïda, Marhoum Ben Taïeb.

-    620 ha 75 a, appartenant aux indigènes des Ouled Bata.

 

23 juin 1887

Décision autorisant l’accomplissement des formalités préalables à l’expropriation des terres du caïd des Beni-Maïda.

 

29 juin 1887

Avis administratif. Création d’un village au lieu-dit Aïn-Tissemsil (Miliana).

En exécution des articles 26 et 27 de l’ordonnance du 1er octobre 1844, article 19 de la loi du 16 juin 1851, 1 et 2 du décret du 11 juin 1858 et des décisions de Monsieur le Gouverneur Général, en date des 12 mai et 23 juin courant, il est donné l’avis que l’administration va poursuivre l’expropriation pour cause d’utilité publique avec prise de possession d’urgence d’une superficie de 1.028 ha 50 a présumée appartenir au sieur Marhoum Ben Taïb, caïd des Beni-Maïda sise dans le périmètre du village de Aïn-Tissemsil.

Conformément aux dispositions de l’article 2 du décret du 11 juin 1858, les propriétaires présumés et autres intéressés sont admis, du 10 au 19 juillet prochain inclus, à consigner leurs observations ou réclamations sur un registre ouvert à cet effet à la mairie de la commune mixte de Teniet-el-Haad où le plan des lieux sera déposé pour leur être communiqué.

 

15 septembre 1887

La levée des parcelles à acquérir des sieurs Allemand et Marhoum Ben Taïeb pour la création du centre d’Aïn-Tissem nécessitera une dépense de 3.462 F.

 

Fin 1888

Dans un rapport au Gouverneur Général :

Les formalités pour l’acquisition des terres sont en cours d’exécution, une somme de 78.000 F a été payée à M et Mme Allemand, une somme de 40.500 F a été payée au caïd des Beni-Maïda.

Les terres cédées par M Allemand auraient une contenance de 1.137 ha 78 a. Ceux acquis des Beni-Maïda 845 ha 35 a.

Il est prévu de payer les terrains au prix de 75 F par hectare.

 

26 avril 1889

Le Gouverneur Général met à la disposition du Préfet d’Alger une somme de 11.294,22 F pour lui permettre de désintéresser définitivement les sieurs Allemand et Marhoum Ben Taïeb.

 

23 octobre 1890

Lettre du Préfet d’Alger au Gouverneur Général :

En échange des terrains expropriés dans le périmètre du village de Vialar, l’Etat cède à la famille des Ouled Bakhti, la totalité du Bled El-Aneb ainsi que 2 autres parcelles et une soulte de 9.453,97 F. Cette somme sera attribuée le 28 octobre 1890.

 

La vie du village

 

On était en droit d’espérer qu’avec un ensemble de colons métropolitains mêlés à l’élément algérien, on obtiendrait un peuplement fatalement appelé à réussir, en raison même de la variété des origines et de la diversité des aptitudes naturelles ou acquises réunies. Mais comme à tous ceux qui travaillèrent aux premiers jours de la colonisation, leurs débuts furent difficiles, ils eurent à surmonter nombre de difficultés et subirent quelques déboires.

A cette époque, le métier de colon n’était pas une sinécure. Constamment sur le qui-vive, parcourant à marches forcées d’immenses territoires arides, sous un soleil torride, manquant de ravitaillement, éprouvés par la maladie.

L’Algérie Française ne se serait certainement pas créée aussi vite, si des pionniers de cette trempe n’avaient pas existé. C’est au grand jour, avec de réelles qualités bien françaises, sur des terres concédées par la France, qu’ils ont acquis leur fortune avec une scrupuleuse honnêteté.

Combien, hélas, ont échoué, dont on ne sait plus les noms !

Extraits de notes rassemblées par Jocelyne Garcia,animateur de l’Association des Vivarois.[1]

 

L'église

 

Le 22 mai 1955, la construction de l’église était terminée grâce aux dons de tous les chrétiens et ceux, importants, de l’abbé Estival, curé de Vialar, ainsi même que de grands chefs arabes, tels que le bachaga Belkacem et le caïd Ben Azédine. Elle fut consacrée par Monseigneur Duval, archevêque d’Alger.

 

 

Voici des extraits du discours de Pierre Forzy, président du Comité de l’Érection de l’Église de Vialar :

 

En ce jour de fête, permettez-moi, Excellence, d’invoquer la mémoire de notre vénéré Monseigneur Leynaud qui fut notre président d’honneur et notre bienfaiteur et qui espérait tant voir notre église achevée...

Excellence, vous accomplissez aujourd’hui cette promesse en nous conviant à cette cérémonie à laquelle vous avez voulu donner tant d’éclat ; vous avez comblé tous nos vœux et soyez assurée que toute la population est sensible à l’honneur rendu à la paroisse.

En 1935, un premier comité fut fondé, mais après la guerre les premiers fonds furent dévalués - c’est sous l’impulsion d’un saint prêtre, l’abbé Lamérand, plein d’allant et de confiance, que fut créé un deuxième comité. Sous la direction de Monsieur l’Abbé Estival, nous nous mettions à l’œuvre ; nous faisions appel à la générosité de tous - Monseigneur Leynaud nous avait dit : « Dès que vous aurez un peu d’argent, commencez à bâtir, et, lorsqu’on verra les travaux commencer, les dons arriveront plus généreux. »

L’un de nous ayant trouvé dans un Pays du Nord la maquette d’une église, nous faisions approuver le projet par Monseigneur Poggi, directeur de l’association des œuvres diocésaines, le 26 juin 1950.

Le travail fut confié à M. Mathous, entrepreneur, que je suis heureux de voir aujourd’hui parmi nous ; il fit preuve d’un grand désintéressement pour que cette construction soit faite dans les meilleures conditions.

Excellence, voici notre œuvre achevée ; cette église a demandé beaucoup de travail, de générosité - c’est l’œuvre de toute une population unie dans un même sentiment de foi et de confiance. - Ils se sont mis au travail, ceux qu’on appelle les colons, comme le laboureur de Péguy : « Ils aiment autant labourer que moissonner, et semer que récolter - tous les ans à la même époque, avec la même vaillance, tout le long de l’année le même travail, avec la même patience. Voilà ce qui tient tout, ce qui garde tout, ce qui sauve tout ce qui peut être sauvé. »

C’est parce que le Bon Dieu a béni leurs moissons que nous avons pu construire cette église. - Je lève mon verre à la santé de tous ceux qui sont aujourd’hui parmi nous, en un sentiment de foi de l’Algérie Française. »

 

L’année d’après, le 11 janvier 1956, nouvelle réunion présidée par l’archevêque pour remettre à Pierre Forzy la décoration papale du Bene Meremti par Pie XII.

Nous donnons un extrait du discours de Monseigneur Duval à cette occasion :

 

Le souvenir demeure bien vivant dans nos cœurs de la splendide manifestation de foi, qui a marqué la consécration de l’église de Vialar. - La ferveur religieuse de tout un peuple en liesse donnant une ampleur et un éclat extraordinaire aux rites majestueux de la liturgie... 

 

Monseigneur Duval retraça le passé de Pierre Forzy, la guerre de 1914-1918, ses décorations, ses citations, ses activités depuis son arrivée à Vialar en 1922 ; son culte du devoir est demeuré la marque et la grandeur de ses activités dans la vie civile, dans l’administration de son exploitation agricole. - L’esprit de justice sociale marche de pair avec l’application intelligente des progrès techniques.

 

M. Forzy connaît le chemin des cœurs ; il plaît par sa bonté, sa compréhension, se faisant aimer de ses employés musulmans. - Dans la région, il jouit de l’estime générale. - Chaque fois que sonne l’appel du dévouement, il répond : Présent !

 

Après cette cérémonie, remerciements de Pierre Forzy à Monseigneur Duval, ainsi qu’à Monseigneur Dauzon, les prêtres, les membres du comité et toute la population.

Cette cérémonie fut suivie d’un déjeuner à Ouarzen, le bled des Forzy. 18 couverts à la table d’honneur présidée par Son Excellence et de nombreuses personnalités. L’Archevêque expliqua ses idées algériennes que l’assistance ne partageait pas pour de multiples raisons, mais autant parler à un mur... A la deuxième table, 12 couverts où tous étaient Algérie française. Les dames n’étaient pas conviées, les capacités d’invitation ne pouvant excéder trente personnes.

 

Aujourd’hui, cette église est devenue une mosquée.

 

 



[1] - Extrait de « L’Algérianiste », n° 73.