Sabatier

 

 

 

LE CHÂTEAU DE FONPLÉGADE

  

 

Le domaine de Fonplégade n’était à l’origine qu’un ensemble de parcelles de vignes dispersées entre divers petits propriétaires. La trace la plus ancienne que nous trouvons est la mention d’une reconnaissance[1] faite par Léonard Despaigne en faveur du couvent des frères prêcheurs de Saint-Emilion, datée du 2 septembre 1531.[2]

Parmi les propriétaires les plus anciens, nous trouvons : Léonard Despaigne en 1531, Jean Collinet en 1597, Pierre Durand dit Charles en 1607, Andrée de Labat veuve de Jean Collinet en 1688, Vidon Jean en 1712. Ce dernier vend à cette année là, quelques lopins de vigne situés à Fomplégade à Etienne Fourtin dont nous ferons plus amplement connaissance ci-dessous. Nous ne savons malheureusement rien de précis sur ces quelques propriétaires.

 

famille Fourtin

 

Etienne Fourtin est laboureur à Saint-Martin-de-Mazerat où il demeure. Il fait l’acquisition le 4 décembre 1712, d’une pièce de vigne au lieu de Fomplégade appartenant alors à Vidon Jean, terre dont il prendra possession le 28 février 1714.

« Il auroit acquis de [....] Merlet bourgeois de Libourne une piesse de pred citué en la parroisse de St Sulpice mesme jurisdiction [....] plus par un autre contrat du 4 decembre 1712 reçu par moy notaire il a acquis de Vidon Jean trois loupins de terres labourables et vignes en la dite paroisse St Martin au lieu appelé puit du Petit Granet, aux Boris? et a Fomplegade »[3]

De son mariage avec Marguerite Augrand, Etienne aura deux fils, Pierre et Jean Fourtin, qui se partageront, après quelques conflits, les biens laissés par leurs défunts parents.

Pierre Fourtin, laboureur, fils aîné du couple, épouse Jeanne Bernard en 1704[4]. Son frère, Jean Fourtin, laboureur à bœufs, épousera Marie Rivière en 1713. Les deux frères font division des biens de leurs parents le 25 mars 1732. Pierre reçoit lors de ce partage deux parcelles de terre à Fomplégade[5], et fait l’acquisition le 1er juin 1738 d’une nouvelle parcelle de vigne appartenant à Pierre Rollet, forgeron, demeurant à Saint-Christophe[6]. Son frère, Jean, également propriétaire à Fomplégade, vend un lopin de vigne à Pierre Lacoste le 24 avril 1747.

 

famille Labat

 

Jean Labat est vigneron lors de son mariage, en 1716, avec Jeanne Jean (en 1750, lors du mariage de son fils Raymond, ils exercent la profession de marchands), il est  le fils de Pierre I Labat et de Marie Saujon[7]. Quatre enfants naîtront de ce mariage : Pierre II, Raymond, Jeanne et Marguerite. Jean fait son testament le 14 mai 1760. Par cet acte il lègue à son fils Raymond une pièce de vigne située à Fomplégade d’une contenance de quatre brasses. Il décède le 9 avril 1768 âgé de 80 ans. Son épouse est décédée le 16 octobre 1753 à l’âge de 67 ans.

« Plus aura ledit Raymond I Labat [....] une autre pièce en vigne située au lieu de Fomplégade contenant environ quatre brasses joignant le sieur Gastodie [....]. »

Leur fils Raymond II exerce la profession de maître cordonnier à Saint-Martin-de-Mazerat. Il épouse en 1750, Marie Mandron, fille d’un autre maître cordonnier, Philippe Mandron, et de Marie Clermontet. Il vend ces dernières à son voisin immédiat, Joseph de Moulinier, sieur de Gastadie, le 9 août 1768[8].

 

famille de Moulinier

 

Thérèse de Pipaud, veuve de François de Moulinier, reconnaît en faveur du couvent des frères prêcheurs de Saint-Emilion, une parcelle de terre à Fomplégade le 12 mars 1725[9].

Son fils, Joseph de Moulinier, écuyer, sieur de Gastaudie, épouse le 18 mars 1748, Marguerite Desmoulins fille de Jean Antoine Desmoulins, seigneur de Masperier, conseiller du roi en la grande chambre du parlement de Bordeaux, et d’Elisabeth de Lafaurie[10]. Il reçoit très probablement une partie de la propriété de la succession de ses parents et fait par lui-même l’acquisition de quelques parcelles de vigne, notamment le 9 août 1768, de Raymond Labat[11].

Jean Baptiste de Moulinier, fils du précédent, obtient le domaine de son père et s’en sépare en faveur de Jacques Gaussens, le 22 mai 1798.

 

famille Gaussens

 

Jacques Gaussens, notaire publique et commissaire du directoire exécutif, demeurant à Brannes, achète la propriété le 22 mai 1798 à Jean Baptiste de Moulinier pour la somme de vingt deux mille francs en écus. Le domaine consiste alors en logements pour cultivateurs, chai, cuviers, jardins, terres labourables, vignes et ruisseau. le tout  en un seul tenant.

Le domaine reviendra, lors de son décès, à son fils, Pierre Auguste Gaussens, propriétaire sans profession, habitant également à Brannes. Ce dernier se séparera de la propriété en faveur de Jean-Pierre Beylot, le 21 novembre 1812, pour la somme de douze mille francs[12].

 

Jean-Pierre Beylot

 

Jean-Pierre Beylot, ancien négociant, demeurant à Libourne, veuf de Flavie Adélaïde Ollivier, vend le domaine à notre ancêtre, Alexis Sabatier. La vente est conclue pour la somme de cinquante quatre mille francs. La propriété se compose alors d’une maison de maître, maisons des cultivateurs, chais, cuviers, bâtiments d’exploitation divers, jardins, terres labourables, vignes, divisée en trois borderies : Fomplégade, la Croix Saint-Gaudens et Goudecheau, le tout d’une contenance de dix-sept hectares, quarante-quatre ares et soixante-cinq centiares. Monsieur Beylot apportera beaucoup au domaine, il est à l’origine de la construction de  la maison d’habitation ainsi que des divers autres bâtiments, mais aussi de l’achat de nombreuses terres.

 

famille Sabatier

 

Alexis Sabatier, négociant à Bordeaux où il demeure, achète la propriété le 19 mars 1852 à Jean-Pierre Beylot. L’achat fut fait au nom de la société existant entre lui et le duc de Morny pour leur maison de commerce en vins et spiritueux (société créée le 12 mars 1849 par acte passé chez Maître Labarde notaire à Paris). Alexis Sabatier ajoutera quelques parcelles au domaine entre 1853 et 1854 avant de s’éteindre le 9 octobre de la même année, à Saint-Emilion, victime du choléra. Il laisse comme héritiers son épouse Hermance Piquet et ses trois enfants : Marie Berthe qui décédera à Bordeaux le 29 février 1860, Marie Joséphine Alix, épouse de Jean Charles Herman Duchon- Doris, et Marie Marthe Angèle, épouse de Louis Auguste Pierre Charles Auschitzky.

Le 30 mai 1853, Alexis achète à Louis Labat, propriétaire cultivateur, une pièce de terre à Fomplégade avoisinant de toutes parts le domaine déjà existant. Louis Labat avait reçu ce lopin de terre dans la succession de son père Pierre, qui en était propriétaire depuis plus de quarante ans. A la même date, il obtient de Lazard Navaille, propriétaire aubergiste, et de son épouse, Jeanne Despaigne, une pièce de terre également située à Fomplégade et provenant de la succession des parents de l’épouse.

Le 4 juin 1862, par acte passé chez Maître Puiffe Magondeau notaire à Libourne, Charles Auguste Louis Joseph de Morny revend à la veuve d’Alexis Sabatier, ses parts sur le domaine. La liquidation de la société des vins et spiritueux, Alexis Sabatier & Cie, avait eu lieu le 28 novembre 1854.

Suite à la demande en partage faite par les époux Auschitzky, des biens délaissés par Alexis Sabatier, la propriété fut vendue par adjudication et acquise par la comtesse de Galard, le 26 mai 1863.

 

Marie Ernestine de Marignan, comtesse de Galard

 

Marie Ernestine de Marignan fut l’épouse du comte Philippe Rose Hector Raymond de Galard, dont elle était restée la veuve. Son domicile principal se situait dans le Gers. Elle fit l’acquisition du domaine par adjudication devant le tribunal de grande instance de Bordeaux (jugement de l’audience des criées), le 26 mai 1863 pour la somme de cent cinquante mille francs.

La comtesse vend le domaine par adjudication volontaire devant Maître Anthony, notaire à Bordeaux, aux banquiers Pères, Gage et Ader.

 

la Banque Pérès, Gage et Ader

 

La banque Pérès, Gage et Ader, dont le siège social se situe à Auch (Gers), rue Balguerie, fait l’acquisition du domaine par adjudication volontaire, le 5 juin 1872, pour  la somme de cent-sept mille francs. La propriété est revendue le 2 août 1873.

Le domaine se compose alors d’une maison de maître et logement pour cultivateurs, bâtiments d’exploitation, terres, vignes, bois, fontaines et ruisseau en un seul tenant, d’une contenance de 10 hectares 28 ares et 60 centiares. Est également inclus dans la vente, un enclos dit de Goudicheau, composé d’une maison de bordier, terres et vignes d’un seul tenant, d’une superficie d’1 hectare 16 ares 95 centiares. Les maisons sont cédées avec leur mobilier. La vente est conclue pour la somme de quatre-vingt mille francs.

 

Pierre Paul Boisard

 

L’acquéreur est Pierre Paul Boisard, propriétaire, négociant et maire de la commune de Saint-Christophe-des-Bardes, où il demeure château Laroque. Il l’achète quatre -vingt mille francs. Il fut l’un des propriétaires les plus marquants de cette terre à qui il donna sa passion et mis tout son savoir et sa combativité à son service, luttant notamment avec acharnement contre le phylloxera.

Le domaine reviendra lors de son décès, à sa fille adoptive, Pauline Marie Magdelaine Boisard, épouse de Siméon Elisée Ruben Rochefort, propriétaire.

 

Jean-Marie Moueix.

 

La demoiselle de Rochefort vendra la propriété, en 1953, à M. Jean-Marie Moueix. Le château est alors en fort mauvais état, et il faudra tout le courage et la détermination de cet homme pour redonner au domaine sa vie et sa réputation.

 



[1] - Acte par lequel le nouveau propriétaire d’un lieu reconnaissait le seigneur légitime de sa terre (Dans le cas présent : les frères prêcheurs de Saint-Emilion).

[2] - Reconnaissance en faveur du couvent des frères prêcheurs par Andrée de Labat, veuve de Jean Collinet, datée du 26 décembre 1688.

[3] - Acte de vente Vidon Jean & Etienne Fourtin du 4 décembre 1712.

[4] - Transaction du 23 novembre 1732, page 2.

[5] - Transaction Pierre & Jean Fourtin du 28 novembre 1732.

[6] - Achat Pierre Fourtin contre Pierre Rollet du 1er juin 1738.

[7] - Contrat de mariage Jean Labat & Jeanne Jean du 29 décembre 1715 passé devant Me Augrand.

[8] - Reconnaissance par Jean Joseph de Moulinier du 9 août 1768.

[9] - Reconnaissance par Jean Joseph de Moulinier du 20 juillet 1761.

[10] - Contrat de mariage de Joseph de Moulinier & Marguerite Desmoulins du 27 avril 1748 passé devant Me Isambert.

[11] - Achat Raymond Labat & Joseph de Moulinier du 9 août 1768.

[12] - Vente Pierre Auguste Gaussens à Jean Pierre Beylot du 21 novembre 1812 passée devant Me Banizette.