Alliances libournaises

 

 

 

LE CHÂTEAU DE VAYRES

Propriété de la famille LACAZE de 1755 à 1795

 

 

Le Président Armand-François de Gourgue, cinquième marquis de Vayres, résidait au Château et d’ailleurs n’avait pas voté aux Etats Généraux avec la noblesse de Guyenne ; ce qui explique sans doute qu’à la faveur des premiers troubles révolutionnaires, des habitants de Vayres se soient rendus sur une lande dépendant du Château, y coupant au pied vingt-cinq journaux de bois taillis.

En 1790, Saint-Pardon, qui possédait un prieuré (dont l’église fut vendue en 1843), mais qui avait toujours été placé sous la juridiction du marquisat de Vayres, fut réuni à la nouvelle Commune qui remplaçait l’ancienne ″paroisse″.

Vayres ne compta aucun émigré ; il n’y eut donc pas de ″biens nationaux″. Mais, pendant la Terreur, deux familles furent éprouvées. Le Président de Gourgue, arrêté à Poissy et jugé avec trente Conseillers du Parlement de Paris, fut condamné à mort et guillotiné le 20 avril 1794, bien qu’il fût aveugle depuis plusieurs années. Le Château mis sous séquestre, une partie des terres fut distribuée aux habitants de Vayres et les bois avoisinants coupés et vendus au profit de la nation. Dans le pillage qui suivit, on ne respecta que la chambre où avait couché Henri IV. Toutefois, en 1795, la veuve et les enfants du marquis de Vayres, qui n’avaient pas quitté la France, rentrèrent en possession de ceux de leurs biens qui n’avaient pas été vendus.

Après son achat en 1755 par Jean Mathieu de Boissac, la Maison noble de Bel Air était passée à son fils Antoine, célibataire mort jeune, puis à sa fille Victoire, mariée à Jacques Lacaze et mère de deux enfants, qui, elle aussi ne survécut à leur naissance que quelques années. Esprit cultivé et libéral, fondateur des ″Amis de la Constitution″, Jacques LACAZE, actif Bourgeois libournais réussit à approvisionner en grains sa ville natale lors de la disette de 1789. Très populaire, il fut élu en 1792 Administrateur du département (Conseiller général) et peu après député de la Gironde à la Convention. Mais devenu membre influent du Groupe des « Girondins », il avait refusé, lors du procès de Louis XVI, de voter la mort du roi et opté pour son bannissement à la fin de la guerre. Marat le dénonça et, arrêté à Paris le 5 octobre 1793, il fut condamné à mort par le Tribunal révolutionnaire et guillotiné le 31 octobre. Les scellés furent placés sur sa maison de Bel Air ; et un conseil de famille géra jusqu’à leur majorité les biens des deux frères Lacaze, dont le second, Joseph, conserva jusqu’à sa mort en 1846 la maison et une partie du domaine.

Les ″volontaires de l’an II″ et les jeunes gens appelés par la réquisition étaient partis à la guerre avec enthousiasme en 1793. Mais, sept ans plus tard, la Municipalité constatait que de nombreux conscrits de l’année n’avaient pas rejoint leur corps, la plupart demeurant cachés, souvent dans leur famille. Et il fallut l’intervention des Chasseurs basques, alors en garnison à Libourne pour les décider à partir.

1804 vit l’Empire succéder à la République consulaire. Et plus tard, en 1809, Napoléon Ier ordonna d’utiliser le Château de Vayres comme hôpital pour les prisonniers espagnols malades. Il y arrivèrent en avril ; mais il en mourut un grand nombre, dont certains furent inhumés à Vayres au ″champ des Espagnols″ et l’hôpital ne tarda pas à être fermé.

Le château appartenait alors, depuis 1795, à Armand-Dominique Ange de Gourgue, fils aîné de l’infortuné Président de Gourgue et donc le sixième marquis de Vayres. Maître des requêtes au Conseil d’Etat, il avait été élu, après la chute de l’Empire, député du Tarn-et-Garonne (Moissac) en 1820 et le resta jusqu’en 1826, pour devenir pair de France en 1827. En 1828, il accueillit au Château de Vayres la duchesse d’Angoulême, sœur du roi Charles X, qui visita la chambre où avait jadis couché son aïeul, Henri de Navarre.

A Bordeaux cependant, le pont de pierre sur la Garonne, commencé en 1812 sur l’ordre de Napoléon Ier, avait été terminé en 1821 par l’ingénieur en chef des Ponts et Chaussées (ensuite Inspecteur général et constructeur de bout en bout de ce magnifique ouvrage). Deschamps avait également réalisé le pont de Libourne sur la Dordogne (inauguré le 25 août 1824) et la nouvelle route reliant les deux ponts par Beychac et Arveyres. La traversée de la rivière par le bac de Saint-Pardon,où l’on accédait auparavant depuis Lormont par Saint-Loubès et Izon, fut de moins en moins fréquentée ; mais, en 1914, il y avait encore un ″passeur″ pour transborder en barque piétons et cyclistes.

La Révolution de juillet 1850 amena la création à Vayres, le 5 août, d’un Comité d’ordre public, Le maire, Castaing Beauséjour, d’origine médocaine, propriétaire du domaine de Thoulouze, en fonction depûis 1811, mais qui avait en 1815 prêté serment aux Bourbons, fut contraint de démissionner. Et, par une curieuse coïncidence, il fut remplacé par son homonyme, Pierre Castaing aîné, qui présidait le Comité. Fils d’un boulanger qui avait fait construire en 1751 sa maison de Nioton (aujourd’hui propriété de ses descendants), il avait servi dans les armées du Consulat et s’était marié en 1805. Il jura fidélité à Louis-Philippe avec le nouveau Conseil municipal le 24 octobre 1830 et ne quitta ses fonctions de maire de Vayres qu’en 1837, pour raison de santé.

Le sixième marquis de Vayres s’était en 1830 retiré au Château. Chevalier de la Légion d’honneur et de l’Ordre royal de Saint-Louis, il y mourut en 1841, âgé de 64 ans ; il laissait quatre filles. Le titre de marquis de Vayres et d’Aulnay passa donc à son neveu, René-Dominique de Gourgue, de la branche cadette, mort à Paris en 1884.

Mais le Château de Vayres resta la p^ropriété de la marquise qui devait y terminer ses jours le 11 décembre 1861 ; dame d’honneur en 1816 de la duchesse de Berry, cette femme remarquable passait pour avoir exercé vers 1818 une heureuse influence sur le duc de Richelieu, alors Premier ministre de la Restauration. Deux ans avant sa mort, elle avait cédé à la Commune le terrain nécessaire à l’agrandissement du cimetière ; le Conseil municipal lui offrit l’emplacement du tombeau qui existe encore. Les Vayrais estimaient avec raison que le nom de l’illustre famille de Gourgue méritait d’être perpétué sous cette forme, au milieu des défunts.

A la mort de la dernière marquise, le Château de Vayres passa à sa fille aînée, Cécile-Eugénie de Gourgue (1819-1894), qui avait épousé en 1849 le baron Alexandre-Christian de Bony (1817-1893). Leur fils, le baron Christian de Bony, né en 1859 et marié en 1885 avec Melle d’Auberty, vendit le Château de Vayres au début du XXe siècle.

 

Extrait du site de la Commune de Vayres (Gde).