Elle est composée de sept panneaux. Elle est due à l’art de Guillaume ALAUX (1856-1912), dont le père, Gustave ALAUX (1816-1882), architecte, a construit l’église, tandis que Michel, son autre fils (1850-1935), l’a agrandie vingt ans plus tard.
Elle représente le couronnement de la statue de
La peinture de la fresque est un véritable reportage de la cérémonie qui suit. Chaque personnage, officiel ou allégorique, a été peint avec un grand souci de réalisme et de vérité.
Cérémonies du centenaire du couronnement de la statue de Notre-Dame d’Arcachon
Le mercredi 16 juillet ayant été choisi
pour la cérémonie du Couronnement, le Cardinal Donnet, archevêque de Bordeaux,
arriva le veille à 18 heures, accompagne de son coadjuteur, Mgr de
Le maire Jean Mauriac, le conseil municipal et les fonctionnaires
des diverses administrations s'étaient rendus à la gare pour accueillir les
prélats. Sous un arc de triomphe, devant la gare, Jean Mauriac les harangua.
Aux évêques, il déclara que c'étaient les évêques qui avaient fait
Le cardinal répondit au maire ; puis des calèches s'avancèrent dans lesquelles tout le monde s'assit pour gagner l'Eglise Notre-Dame, derrière la musique du 57ème de ligne. Une compagnie de ce régiment, formant une escorte d'honneur, suivait les voitures.
A Notre-Dame, le cardinal monta en chaire et remercia les prélats
d'être venus. Le salut terminé, le cardinal et Mgr de
LE 16 JUILLET 1873 au matin, dès 3 h 30, les cloches de Notre-Dame tintèrent pour annoncer le début des messes célébrées sans interruption par les nombreux prêtres venus à l'occasion du couronnement.
A 8 h 30, nouvelle réception à la gare. Cette fois, il s'agit des autorités civiles et militaires.
A 9 heures, tous les participants sont
rassemblés devant le presbytère, sauf le cardinal et son coadjuteur. Le
cortège se forme : en tête la croix et les enfants de chœur, la musique des
élèves des Frères des Ecoles Chrétiennes de Bordeaux, la musique du 57ème
de ligne, deux cents prêtres, abbés et chanoines, en habit de chœur, la statue
de Notre-Dame sur un brancard, portée par quatre chanoines. Des soldats forment
autour de la statue une garde d'honneur. Suivent les archevêques et évêques,
mitre sur la tête et crosse à la main, derrière eux le général commandant
Lorsque les cloches de Notre-Dame se
mettent en branle, la procession se met en marche et descend l'avenue de
Un autel avait été dressé en plein air contre le mur ouest de l'Eglise Notre-Dame, abrité sous une sorte de vélarium, ainsi qu'une tribune réservée aux autorités.
Lorsque chacun est à son rang, le cardinal
remet la couronne de
Le cardinal bénit les couronnes et les dépose au pied de la statue.
A 10 heures, la messe commence, célébrée
par le cardinal. Le sermon est prononcé par Mgr de
Quand les canons se sont tus, est chantée une cantate, paroles du chanoine Audoin et musique de M. d'Etcheverry.
Après le dernier couplet :
« Partez chars embrasés qui mesurez la terre,
« Sur vos ailes de feux, regagnez l'horizon,
« Et des milliers de voix
vont dans
« Préconiser les gloires d'Arcachon. » 1,
la statue est ramenée dans
L'APRES-MIDI ET LE LENDEMAIN
xxxL'après-midi, les vêpres furent chantées
à l'emplacement de la messe du matin. Après le Salut du Saint Sacrement, la
statue fut portée en procession à l'extrémité de l'allée de
Le soir, une retraite aux flambeaux
précédée par la musique militaire, parcourut la ville. Le quartier de
Dans les cérémonies du 16 juillet avaient
dû céder le pas aux Officiels ceux dont
La matinée du 17 juillet leur fut réservée. Le cardinal célébra la messe : Toujours la même affluence, le même recueillement, la même pompe dans les cérémonies... tous les marins du littoral entouraient l'autel où Son Eminence offrait pour eux, aux pieds de la statue miraculeuse, le Saint Sacrifice ».
Mgr d'Outremont, évêque
d'Agen parla « à cet auditoire composé d'hommes en qui tant de vertus se dérobent
sous une rude enveloppe » (
La procession nautique décommandée
En 1923, à l'occasion du cinquantenaire
du couronnement de la statue de Notre-Dame d'Arcachon, le journal L'Avenir
d'Arcachon, le 15 juillet, consacra un article aux fêtes du 16 juillet
Cet enfant de choeur avait vu « les
évêques prendre place sur un même bateau avec
Le cortège nautique avait circulé au
milieu d'une foule d'embarcations pavoisées, puis le débarquement s'était
fait à
Dans son livre Notre-Dame d'Arcachon,
achevé d'imprimer le 12 mai 1937, André Rebsomen, après avoir décrit les cérémonies
de la matinée du 16 juillet 1873, poursuit : « L'après-midi, après les
vêpres et le sermon, eut lieu la procession nautique. Les évêques prirent
place sur un même bateau avec
André Rebsomen, comme on le voit, a fait largement confiance à ″Vidi″. Il a eu tort, car iI n'y eut pas de procession nautique.
« Sauf la procession nautique, qui a
été contremandée ; on ne sait pour quel motif, mais assurément par suite d'une erreur car le temps était beau, le programme a été rempli de la
façon la plus heureuse », dit le journal
Quant à L'Aquitaine, la semaine religieuse de l'archevêché, du 26 juillet, elle se lamente :
« ... Qu'il était beau le Bassin à ce moment-là, avec sa surface légèrement ridée par la brise, ses innombrables barques, ses vapeurs pavoisés, ses lumineux horizons, et la paix qui semblait descendre du ciel sur ses flots.
« Hélas ! Nous nous éloignâmes de ces rives avec un vif regret. Une procession nautique avait été annoncée... elle n'avait pas lieu. Pourquoi ? Nous n'en savons rien. De quel spectacle et de quelle consolation, nous avons été cependant privés !
« Voyez-vous ces barques qui se groupent, se croissent et se mêlent à la suite de l'image et des étendards de Marie ? Voyez-vous ces voiles gonflées, entendez-vous comme les cantiques saints retentissent sur les flots sonores ? Quel tableau, quelle féerie ! Ne dirait-on pas une scène du paradis sur la terre ? Hélas ! Tout cela notre imagination l'avait attendu et rêvé, mais nos yeux ne l'ont pas vu.
« Oh ! marins d'Arcachon, vous auriez voulu que votre Madone bien aimée marquât de ses pas l'étendue de votre domaine et répandit sur les flots qui sont votre élément, ses bénédictions maternelles, mais votre archevêque le voulait autant que vous, Marins d'Arcachon, la suppression d'une solennité qui vous est si chère, et avec raison, vous a laissé comme un amer souvenir, mais le cœur de votre archevêque est, à cet égard, impressionné comme le vôtre ; ce qui a été une privation pour vous, a été une souffrance pour lui... »
La cause est entendue. Il n'y a pas eu de procession nautique le jour du couronnement de la statue de Notre-Dame d'Arcachon.
Les jeunes enfants de chœur3 de 1873, devenus sexagénaires, durent mêler leurs souvenirs de la fête du couronnement avec ceux d'autres cérémonies postérieures. ″Vidi″ n'a pas vu et André Rebsomen a négligé la critique historique. Au demeurant, cette erreur historique n'est pas bien grave, mais la question demeure : « Pourquoi la procession nautique prévue n'eut-elle pas lieu ? »
Le banquet
Sans nous dire pourquoi le bien pensant
journal
A Arcachon, déclarait
Au dessert, Jean Mauriac, maire d'Arcachon,
porta un toast « aux illustres prélats et aux autres invités » (
Le cardinal Donnet répondit « par une de ces causeries pleines de bonhomie paternelle et de pittoresques saillies qui lui sont si familières » (même source)... et les vêpres durent être retardées d'une heure.
A vrai dire, la verve d'un vieil homme (Le cardinal avait 78 ans), spirituel et bavard, n'est pas seule responsable de ce retard, le menu aussi y est pour quelque chose. Il était fameux. Qu'on en juge :
Potage printanier
Croquettes à la dauphine
Truite sauce au beurre
Jambon aux petits pois
Filet de bœuf sauce madère
Poulet sauté
à
Punch
Dindonneau au cresson
Ortolans aux croûtes
Galantine de lièvre
Salade russe
Croûtes à l'ananas
Dessert
Bombe glacée
Notons l'absence des fines gravettes
du Bassin, mais en 1873, on s'abstenait d'huîtres pendant les mois sans ″r″.
Quant aux vins
On conçoit fort bien qu'un tel exercice gastronomique n'ait pu se plier à l'horaire fixé. Les ortolans aux croûtes et la galantine de lièvre, bien plus que les saillies pittoresques du cardinal, sont les grands coupables. Ils sont vraisemblablement responsables également de cette autre entorse au programme de la journée : la suppression de la procession nautique qui devait suivre les vêpres. Nous émettons, en effet, l'hypothèse que la crainte de voir, après ces agapes, certains estomacs, tant laïques qu'ecclésiastiques, se mal comporter sur les vagues, dut inciter les organisateurs à supprimer la procession nautique sans en référer au vieux cardinal.
Les fêtes du couronnement vues par la presse bordelaise
Le ton critique de certains organes de la presse bordelaise s'explique par la position politique adoptée par le clergé à l'époque.
Principale victime des excès de
Les cérémonies du couronnement, au
lendemain de la chute de Thiers, après l'arrivée à la présidence de
N.-B. —
1°
L'Aquitaine du 26 juillet : De la gare à
2° L'AFFLUENCE
Avec la population locale et les baigneurs,
de 13 à 14.000 personnes ont assisté au couronnement de
3°
Une pluie fine n'a cessé de tomber et les parapluies gênaient la vue. Il y avait environ 2 à 3.000 personnes autour et en face de l'autel dressé contre l'église.
4° LES SERMONS
5°
Le clocher de Notre-Dame présentait un ″M″ gigantesque relevé par des verres de couleurs d'un effet très gracieux.
...A 10 heures du soir, le quartier
de
CONCLUSION
Le Schah, en visite à Paris, est peut-être bien pour quelque chose dans les mécomptes de la ville d'Arcachon.
Dans tous les cas, on l'en accuse et,
s'il est vraiment coupable, cela prouverait que dans notre siècle, la présence
d'un souverain persan est un attrait plus puissant que le spectacle d'un couronnement
de
N.-B. — La presse républicaine ne souffla mot de la messe des marins du 17 juillet 1873, célébrée par le cardinal
Le cardinal et le pêcheur poète
Le Cardinal Donnet, archevêque de Bordeaux et sénateur de l'Empire, aimait beaucoup Arcachon. Il s'employa activement à transformer en ville le village qui s'était implanté dans cette solitude. Les poètes ne raisonnent pas comme les archevêques, sénateurs de l'Empire. Emilien Barreyre d'Ares5, aussi vrai pêcheur que délicat poète, a regretté l'urbanisation du site de la chapelle et il l'a dit en beaux vers dans la langue de ses parents :
« ...que finouse, armouniue e diuzengue
« Entralhéue de biu l'ame das troubadours. »
(qui, fine, harmonieuse et divine, enflammait d'enthousiasme l'âme des troubadours).
« O blanche Arcachon — chante Emilien Barreyre — qu'on ne vienne plus me dire que ce qui te rend éblouissante est ta riche petite ville. Rien que niaiserie et désir de jouer au seigneur que l'éparpillement de tous ces petits châteaux de la dune à ta côte et de tous les styles ! Que serais tu sans la mer qui ronge ton perré et sens la chapelle où se voit Notre-Dame. »
La transformation d'Arcachon était inéluctable et le cardinal Donnet a bien fait d'y contribuer. Il doit en être remercié, mais il n'aurait pas dû toucher à la chapelle. La chapelle d'Arcachon aurait dû rester telle qu'elle était, dans son cadre forestier, avec une large allée, plantée d'arbres aboutissant à la mer. Les constructions n'auraient dû être autorisées qu'assez loin d'elle et l'église paroissiale aurait dû être bâtie ailleurs6. Le cardinal Donnet fit pourtant de la chapelle le lieu du culte de la paroisse d'Arcachon nouvellement créée et, quand l'édifice devint trop petit pour la population, il l'amputa d'un tiers et lui accola une église.
Des gens avisés, ″gens sensadous″, lui dirent qu'il allait tuer le pèlerinage. Il ne le crut pas : « Quelques personnes animées des intentions les plus droites se sont un instant préoccupées de la crainte que l'antique sanctuaire ainsi renouvelé cessât d'être l'objet de la vénération des fidèles ; qu'elles se rassurent. Le pèlerinage n'est point déplacé : le lieu reste le même. Les cérémonies augustes de la religion frapperont d'autant plus les esprits qu'elles seront célébrées dans un temple plus en harmonie avec la majesté du culte catholique.
« Avec quelle émotion nos braves marins et les nombreux étrangers s'y rendront-ils pour prier !» (Lettre pastorale du 25 février 1855).
Pour des cérémonies augustes, il y eut des cérémonies augustes ! André Rebsomen les énumère dans Notre-Dame d'Arcachon : « Quel spectacle chatoyant que celui de ces dames en toilette brillante, aux chapeaux de paille retenus par des noeuds de ruban, aux robes de soie à volants et à dessins brodés soutenues par des crinolines ondulantes, aux épaules couvertes de mantelets, côtoyant des officiers en étincelant uniforme, chamarrés d'or et de décorations ! Quel parterre des plus beaux noms de France ! C'étaient les Tuileries et ses réceptions célèbres transportées dans notre église ! »
Les pêcheurs n'osèrent plus traverser cette église-salon pour se rendre dans leur chapelle. Le nombre des autres pèlerins diminua également. Autrefois, on venait à Notre-Dame d'Arcachon, maintenant il fallait aller à l'église paroissiale d'Arcachon, ce n'était plus la même chose. D'année en année, le pèlerinage du 25 mars perdit de l'importance et le 25 mars devint ce qu'il est aujourd'hui, la fête patronale des seuls Arcachonnais pratiquants ou officiels ».
Les curés des paroisses riveraines du
Bassin, y compris les curés successifs de Saint-Ferdinand, la deuxième paroisse
de la ville d'Arcachon, ne furent pas les derniers à contribuer, peu ou prou,
à la désaffection de leurs ouailles envers
Pourquoi le curé de Saint-Ferdinand,
le quartier résidentiel des pêcheurs aurait-il envoyé ses gens de mer chez
les bourgeois de Notre-Dame ? Pourquoi tous les curés du Bassin n'auraient-ils
pas essayé de détourner vers l'autel de
C'est à partir de ce moment que les
ex-voto des marins des paroisses voisines ne vont plus à Notre-Dame d'Arcachon,
mais à l'église de leur paroisse. En 1904, plus de cent cinquante pêcheurs
de sardines, des ″chardineys″ de Gujan et de Mestras, échappent
à un coup de mer. Leurs ex-voto sont remis à l'Eglise Saint-Maurice de Gujan
et à
Celui de l'église de Gujan est toujours
en place ; c'est une plaque de marbre, apposée dans
Celui de
Le 15 avril 1908, les naufragés de ″
Ce qui reste de la chapelle du XVIIe siècle a été remarquablement restauré en 1972. Cette restauration fait davantage regretter l'amputation subie par la chapelle au XIXe siècle et la destruction du site :
« O louquet bèn aymat ! Ey de [plous plèn moun ame
« De te beyre coum ses anuyt !
« L'om es pec... »
(O petit lieu bien aimé ! J'ai des pleurs plein mon âme de te voir comme tu es aujourd'hui. L'homme est fou...)
« Labets ères un sent perloun et lustsjeues.
« Denstoun soûlas surbèt, îabets mestourejèues
« lou natureu de la bèntat,
« Coum lou Diu du Cèu mestourèje l'aubine. .»
(Alors tu étais une sainte perle et
tu resplendissais. Dans ta solitude superbe, alors tu étais la maîtresse
de la beauté de
Ce qui est passé est mort.
La petite chapelle restaurée ne verra probablement jamais plus :
« Dets mile malireys un cop per an benguèuen
« Saluda lur patroune, e se desgouloumpéuen
« Lou loung de la ma blue en un surbet mur. »
(Dix mille pêcheurs7, une fois par an, venir saluer leur patronne et s'allonger en cortège le long de la mer bleue, comme un superbe mur.)
Jacques RAGOT
Extrait du Bulletin n° 4 de
Documents photographiques aimablement communiqués par M. André Mouls.
1 - Les chars embrasés sont sans doute les trains de pèlerins. Les poètes sacrés d'hier, en langue vernaculaire, ne valaient pas mieux que ceux d'aujourd'hui !
2 - Lettre du curé de Gujan, citée dans « Les Variétés Bordelaises » de l'abbé Baurein (1784-86).
3 - Pour ce qui intéresse notre famille, nous avons toujours entendu dire que les enfants de cœur agenouillés étaient, à gauche, Daniel Auschitzky (en littérature Guy de Pierrefeux), et à droite,non pas notre père qui n’était pas né, mais notre grand-père, Maurice Auschitzky. Ces deux frères étaient tous deux intimement liés avec leur cousin germain Guillaume ALAUX qui a ainsi tenu à marquer pour l’éternité cette solide amitié. D’autres proches figureraient sur la fresque, mais à notre génération nous ne savons plus qui et où.
4 - Allusion au drapeau blanc du comte de Chambord, le futur Henri V si la restauration se faisait.
5 - Né à Ares en 1883, mort en 1944, auteur d'un recueil de poésies en gascon « Las Malineyres » (Les filles de la mer).
6 - Le ministre de l'Environnement raisonnerait, sans doute, aujourd'hui, ainsi.
7 - Exagération poétique : Il n'y eut jamais un tel rassemblement de pêcheurs, qu'au demeurant les effectifs de la population maritime ne permettaient pas.